DANS LA MAIN DES PUISSANTS
Il n’y a pas beaucoup d’espace pour les usagers et citoyens que nous sommes pour faire valoir nos droits.
La loi est la même pour tous, mais pour les humbles les frais de justice, l’administration, les explications, le vocabulaire... Tout fait obstacle. Les médiateurs ne manquent pas pour autant. Mais c’est comme ça, en attendant que l’Éducation nationale dispose de vrais moyens pour permettre à chaque enfant d’accéder à la connaissance, quelque soit son milieu... Ce qui est encore loin malgré les bonnes paroles de maître Blanquer sur son ministère perché.
En matière de retraite, pardi, voilà que le gouvernement, auquel nous éviterons le doublement de la dernière syllabe par une coquille malheureuse, clame, proteste, revendique une volonté unique d’appliquer à chacun les mêmes droits.
Au ras des pâquerettes, mais les mêmes. Sans complexe aucun, Jean-Paul Delevoye, héritier du gaullisme par Chirac, entend bien rétablir « l’égalité ».
Avec ostentation, il veut veiller à abolir les privilèges, si fait ! Des privilèges attribués sans vergogne et aux dépens du bon peuple. De quels privilèges parle-t-il ?
Des 42 régimes dits spéciaux, qui le sont au réel car les salariés des secteurs concernés ont longtemps vécu plus d’injustice que les autres avant que de gagner, aux frais de haute lutte, des droits meilleurs pour supporter les aléas du lendemain. Un trait de plume abolirait ainsi des années de combats, de négociations, de sacrifices ? Alors que la pénibilité peine à être établie parce que la plupart des employeurs ne veulent pas admettre que leurs profits se font sur les reins de leurs salariés.
Les victimes de l’amiante savent combien les employeurs responsables ont tout fait pour que ne soit pas établies de fautes de leurs parts. Les inspecteurs du travail connaissent les méandres des subtilités du patronat pour les accidents du travail et les maladies professionnelles. Combien de retraités atteints par la maladie ont dû, en plus, recourir à la justice pendant des années pour essayer, souvent en vain, de faire reconnaître leurs affres comme maladie professionnelle ?
Messieurs les puissants, ne perdez pas de temps à nous faire accroire que vous êtes innocents comme l’agneau sorti du ventre de la brebis. Personne ne veut vous mettre la tête sous la guillotine, ni sur le billot.
Dans un océan de mauvaise foi, parfois meurtrière, défiez-vous quand même que le peuple ne vienne vous chatouiller les pieds à force de lassitude.
Après l’épisode, mal éteint, des Gilets jaunes, il serait plus prudents, messieurs les puissants d’être moins condescendants. Le 24 septembre sera un avant-goût des mobilisations à venir. Vous avez toutes les cartes en main. Ne choisissez pas les pires.
Par Franck JAKUBEK