Patrick Pelloux avait déjà tiré l'alarme en 2003 : Qu'ont-ils fait depuis ?

Patrick Pelloux: « Monsieur le président, ce que j’attends de vous... »

EN 2003, il avait sonné le tocsin sur la gravité de la canicule. Dix sept ans plus tard, Patrick Pelloux, le président de l’Association des médecins urgentistes de France (Amuf), met en garde contre le risque d'hécatombe dans les EHPAD et réclame des mesures inédites pour bâtir l’après-crise sanitaire.

PATRICK PELLOUX : Qu’attendez-vous de l’allocution du président ?

Qu’il fasse de vraies annonces. S'il prend la parole pour faire de la câlinothérapie et rassurer les Français sur l’épidémie, cela ne sert à rien. Il n'est pas psychiatre, il est président.

Après la grande crise de 1945, les dirigeants de l'époque avaient inventé la Sécurité sociale. Faisons de grandes choses. 

Cette épidémie doit nous permettre de réinventer le monde de demain. Cela commence par l’hôpital

Que faut-il changer ?

Monsieur le président, ce que j'attends de vous, c’est un changement complet de politique Pour repartir de zéro, il faut que vous revalorisiez le budget de l’Assurance maladie et que vous supprimiez la dette des hôpitaux. Il faut aussi rouvrir des lits en réanimation et dans d’autres services.

On en a fermé beaucoup trop. Mais cette transformation ne sera pas possible sans aider le personnel. C'est pour cela que je vous demande d'augmenter d'au moins 300 € par mois le salaire des infirmières, des aides-soignants, des femmes et hommes de ménage et des ambulanciers...

Il est si bas qu'il se situe au 26e rang des pays de l’OCDE, derrière la Turquie et la Croatie. Je vous demande aussi une prime ou une hausse de salaire pour les personnels des urgences et de réanimation qui font un travail très difficile.

Comment mieux se préparer à une nouvelle épidémie ?

On a besoin de stocks de masques à l'avance. Il faut en finir avec cette gestion au fil de l’eau qui fait sauter les verrous de sécurité. C’est pour cela qu'on se retrouve en grande difficulté aujourd'hui.

On ne peut plus dépendre des Chinois pour les masques, les gants, les médicaments, les respirateurs... Nous devons retrouver notre indépendance Monsieur le président, c'est la fin de la mondialisation des années 2000. D faut une politique européenne pour vaincre cette épidémie, en annulant la dette de tous les pays.

Vous avez parlé d’une « hécatombe » dans les EHPAD. Comment l’éviter ?

Elle est déjà en cours. On peut la freiner si on donne des moyens en personnel et en matériel aux EHPAD. Les personnes âgées doivent bénéficier de dépistage massif pour savoir lesquelles sont contaminées.

Elles pourront ainsi être mises à l’isolement Parmi les autres personnes à risque, il y a aussi les plus pauvres, davantage touchés par le Covid -19 en raison de facteurs d'obésité. Cette maladie révèle les fractures sociales en France.

Nous avons besoin d'un grand plan pour lutter contre la pauvreté et favoriser l'égalité dans l'accès aux soins Enfin, personne ne tient compte de nos malades psychiatriques. Cette crise va provoquer une peur collective de la mort.

Durant les attentats, cette peur disparaissait une fois les terroristes tués. Là, c'est tout à fait différent, le virus n’est pas visible. Il faut prendre en compte ce traumatisme surtout chez ces malades. Ne les oublions pas !

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