Les retards pour la santé en France, cachés depuis trop longtemps et couverts sur les médias par des « parlotes » gouvernementale.
Arnaud Chiche - médecin anesthésiste à la polyclinique d'Hénin-Beaumont. Fondateur du collectif « Santé en danger »
Par Philippe Allienne Liberté Hebdo
Voilà des mois qu’Arnaud Chiche, médecin anesthésiste à la polyclinique d’Hénin-Beaumont crie sa colère. « L’hôpital va mourir, » s’exclame-t-il. Sa structure matérielle est exsangue. Il manque de lits et même de brancards, les effectifs sont très insuffisants, les soignants sont mal payés et ne disposent pas du matériel adéquat.
Au CHU de Lille, les gynécologues ne peuvent même pas imprimer leurs
échographies !
Les Smur sont en sous-effectifs. » Pour preuve de la gravité de la situation, un haut responsable hospitalier, sur le littoral Nord-Pas-de-Calais, est décédé la semaine dernière suite à un arrêt cardiaque. L’équipe du Smur, venant de trop loin, n’a pu arriver à temps. Comme disent bien d’autres, il confirme que la crise sanitaire a été un révélateur, voire même a confirmé les failles connues depuis longtemps.
Avec son équipe, Arnaud Chiche a organisé la prise en charge de la Covid, au sein de son établissement. « Lorsque qu’une aide-soignante en ambulatoire doit s’occuper de patients atteints de la Covid, il y a forcément un grand écart de compétences ! » Fin mars, en attente de tests Covid, il n’a pas hésité à menacer l’ARS de fermer les urgences.
« J’ai obtenu les tests dans la journée ! » dit-il non sans souligner l’aberration de la situation. Face à ce qu’il qualifie de « scandale d’État » (30 794 morts en France dont 70 soignants), il a créé, en août et sur internet, le collectif « Santé en danger » qui a regroupé 140 000 internautes en six semaines, essentiellement des soignants partout en France. Son objectif : obtenir un « Ségur II de la santé ».
Il estime que les accords Ségur du gouvernement sont une « insulte faite aux soignants » parce que leurs préoccupations n’ont pas été prises en compte.
« Nous voulons que l’on prenne en compte le travail de nuit, la pénibilité des soins induite par la continuité de ces soins, une véritable revalorisation salariale et des conditions de travail, nous voulons que les gardes de nuit soient doublées et les salaires avec (30 euros de l’heure au lieu de 15 actuellement), etc. »
Le collectif « Santé en danger » s’appuie sur l’union totale des soignants, en ville comme à l’hôpital, dans le privé comme dans le public, des organisations syndicales de la santé (celles qui n’ont pas signé les accords Ségur et celles qui ont signé), les collectifs inter- réanimation, etc.
Le Dr Chiche affirme avoir des soutiens parmi de nombreux députés et sénateurs (c’est le cas par exemple pour les parlementaires communistes) et s’engage à faire le tour des maires.« J’engage les élus à réfléchir à la création d’une union politique de la santé. La santé est un bien universel », plaide-t-il.
La sénatrice communiste Cathy Apourceau-Poly, de son côté, multiplie les contacts pour obtenir ce Ségur II.
« Il faut que ce Ségur soit une réforme de tout le système de santé avec un plan quinquennal », dit encore Arnaud Chiche. Pour lui, cela passe par une remise à niveau du système de soins, le respect de la santé par tous et donc un travail sur les mentalités
(« Il n’est pas normal de venir aux urgences un dimanche à 22 h pour une entorse qui date de quatre jours ! ») et la refonte totale du système de santé.
« Pourquoi la France ne dispose-t-elle que de 5 000 places de réanimation quand il y en a 25 000 en Allemagne ? » s’interroge-t-il.
Pour Arnaud Chiche, « le discours de la vérité est le discours de terrain ». Prêche-t-il dans le désert ? Il prend les devants. Quand il va voir les maires, il leur demande une signature.« Il m’en faut 500 ! » » précise-t-il. Pour une possible candidature à la présidentielle 2022, histoire de forcer le gouvernement à l’écouter.
EHPAD : LE RISQUE DU SYNDROME DE GLISSEMENT
« La gériatrie n’est pas reconnue comme une spécialité à part entière ». S’il admet que ce n’est pas le discours officiel, au moins est-ce son sentiment.
Antoine Estager est infirmier en Ehpad (Établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes), un établissement rattaché à l’hôpital public de Seclin. Pour expliquer son désarroi : « Nous avons beaucoup de mal à obtenir du matériel neuf. Il nous a fallu négocier durant deux ans pour obtenir deux tensiomètres électriques ! »
Ce n’est pas anecdotique. Prendre régulièrement la tension des personnes âgées est indispensable. Avec deux infirmiers en service et un seul tensiomètre pour une centaine de résidents.
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