Une fronde ou un « grand cinéma » chez les macronistes ?
Villani -Orphelin et les autres : Un petit « semblant » de discorde et, ils continueront toujours de voter les désirs de Jupiter
« Peser », mais pas trop : la fronde en papier des macronistes de
l'association « En Commun »
Par Louis Nadau
En guise d'acte fondateur, « En Commun », une association censée permettre à 46 députés macronistes d'infléchir le cours du quinquennat vers plus de social et d'écologie, s'est offert une tribune dans « l'Obs » le vendredi 22 mai. (Cela arrive après la « fronde » d’une autre partie du clan LREM, sous le sigle « Ecologie -Démocratie - Solidarité »… dès le mardi 19 mai dernier.)
ATTENTION, SUBVERSION...
La révolte des « playmobils ». Le vendredi 22 mai, drapés dans une solennité de sénateur romain, 46 députés de La République en marche annoncent fièrement, dans les colonnes de « l'Obs », qu’ils comptent désormais « peser de l’intérieur » sur le groupe parlementaire majoritaire. Et ce, tenez-vous bien, en créant une redoutable association. Baptisée « En Commun », cette dernière est censée permettre aux 46 parlementaires d’infléchir le cours du quinquennat vers la réduction des inégalités et le combat écologique.
Une révolte ? Non sire, à peine une agitation.
De nouveau groupe parlementaire, tel que celui créé en début de semaine par 17 députés « renégats » emmenés par Matthieu Orphelin et Cédric Villani, il n’est pas ici question. « Partir, c’est un constat d’échec. (...) Entre les boucles de discussion sur Télégram et la scission, il y a une troisième voie, celle que nous prenons pour nourrir le débat et l’action de la majorité », soutient auprès de nos confrères le vice-président de l’Assemblée nationale Hugues Renson, parmi les têtes d’affiche de cette détonante initiative, tout comme la présidente de la Commission développement durable, Barbara Pompili.
Plus de majorité absolue à l'Assemblée :
Un séisme tout relatif pour Macron ...
En guise d’acte fondateur, « En Commun » s’est bien entendu fendu d’une profession de foi. Attention, subversion. Alors que le monde « traverse l’une des pires crises qu’il lui ait été donné de connaître », la pandémie de coronavirus « démontre avec force que nous avons besoin des autres, et que notre sécurité repose à la fois sur l’action de tous et la responsabilité de chacun ».
Les 46 députés macronistes dressent cet intéressant constat : le Covid-19 « semble avoir figé notre société dans ses fractures les plus profondes : le statut social et économique, la composition des foyers, les types d’habitat, le lieu de résidence ». Si seulement ils avaient pu voter contre la suppression de l'ISF... « Les inégalités se creusent, regrettent les parlementaires, et certains de nos services publics, pourtant si essentiels, se retrouvent fragilisés. » Comme les deux milliards six d'économies imposées aux hôpitaux publics en 2018 et 2019 ?
Le péril climatique devrait quant à lui « supposer des décisions lourdes, radicales, comme la réorientation rapide et complète de nos modes de production et de consommation ». Dommage que l'interdiction des plastiques jetables doive attendre ... 2040 !
LYRISME BON MARCHÉ
Ces arguties n’empêchent pas les 46 signataires de s’envoyer une belle tranche de lyrisme : « Ce qui est essentiel, c’est ce qui est notre commun : notre santé, notre bien-être, notre environnement et nos ressources, notre éducation. Nous avons une société en commun. Nous avons un destin en commun. Nous avons une Nation en commun. Nous avons une Europe en commun. Nous avons une planète en commun. » Chassez le naturel, il revient au galop : après cette envolée, nos 46 quasi-frondeurs ne peuvent s’empêcher de donner dans les poncifs libéraux, assurant être « déterminés à peser davantage pour que l’épreuve traumatisante que nous vivons tous puisse se transformer en opportunité ». « Sky is the limit », comme on dit.
Les fondateurs d’ « En Commun » font même la grosse voix pour convaincre de leur intransigeance : la réorientation du quinquennat dont ils se veulent les chantres « nécessitera un exercice d’inventaire, équitable mais exigeant, sur toutes les politiques publiques qui ont été menées en France depuis des années, pour ne pas dire des décennies » - après tout, il n’y a pas de raison que les macronistes soient les seuls à prendre.
Et les députés d’épingler « la seule expertise technique » comme boussole de la décision politique, « l’insuffisance de dialogue avec les organisations syndicales et professionnelles » et « l’excès de centralisation ». « A cet égard, nous n’avons pas mieux fait que nos prédécesseurs », reconnaissent humblement les élus. « Le souci d’une dépense efficiente ne doit plus être le faux nez de l’obsession de la rentabilité », poursuivent-ils, convertis à « la réhabilitation du rôle de l’Etat ».
Indépendance : le grand bluff de Macron.
Il ne faudrait tout de même pas pousser le bouchon trop loin. Aussi les élus de la majorité ne manquent-ils pas de saluer la réponse « instantanée, massive, dotée de moyens exceptionnels » du pouvoir à l’épidémie de Covid-19 -
Emmanuel Macron l’a d’ailleurs rappelé récemment : « Nous n'avons jamais été en rupture de masques ». A n’en pas douter, on peut donc compter sur « En Commun » pour aiguillonner l’action du gouvernement sur le chemin des « jours heureux », « parce que c’est aussi en confrontant les points de vue et en créant du débat et des compromis positifs que se dessinera un nouveau contrat républicain ». Surtout si tout le monde est d’accord avec le président...