Parlons des choses qui fâchent.
En évinçant les syndicats ouvriers et patronaux de la discussion salariale, cette conférence des partis politiques lui servira-t-elle à parler de l'augmentation des revenus des grands patrons ou vraiment pour le mieux être des travailleurs ?
Un dîner avec les premiers responsables des partis politiques, une lettre et la faible annonce d'une conférence sociale sur les « minima salariaux » de branches, déjà dans les tuyaux depuis le mois de mars, c'est ce qui résume l'initiative politique de « grande ampleur » qu'avait annoncé le président de la République.
Quoi qu’il en dise, Emmanuel Macron est bel et bien empêtré dans une situation qu'il a lui-même créée en lançant et en arc-boutant sur le report de l'âge de la retraite.
Le mécontentement est toujours là, la méfiance à son égard aussi, même si elle peine à se trouver un débouché politique. Ainsi, en cette rentrée, trois quarts des Français souhaitent un référendum sur les retraites, et ce n'est certainement pas pour approuver sa réforme !
La convocation pour octobre prochain d'une conférence sociale confirme que la question des salaires est au cœur des enjeux sociaux mais aussi politiques de la période. Qu'elle résulte d'une réunion avec les partis politiques plutôt qu'entre la première ministre, les représentants syndicaux et patronaux en dit long sur la volonté du président de la République d'étendre sans limite son domaine dit « réservé » .
Elle témoigne aussi sa volonté maintenue de marginaliser les organisations syndicales, voire pire, de les empêcher d'agir au travers de mesures de plus en plus répressives.
Quant à la conférence sociale, en elle-même, elle n'a rien d'une innovation. Plusieurs gouvernements, de droite et de gauche, y ont déjà eu recours. C'est la volonté politique de mettre en œuvre ce qui en ressort qui fait défaut.
Ainsi sur les minima de branches inférieurs au Smic, les propositions syndicales sont connues de longue date. Il faut réviser le système d'allégement des cotisations patronales sur les salaires jusqu'à 1,6 fois le Smic, mis en place en 1996 par le gouvernement Balladur, élargi par celui de Juppé puis par celui de Jospin et les suivants.
En 2022, ce seul dispositif représentait 35,9 milliards d'euros de cadeaux sans aucune contrepartie aux employeurs. Chaque augmentation du Smic entraîne mécaniquement une augmentation des allègements, mais pas des salaires.
Mis en place au nom du dogme de l’abaissement du « coût du travail » afin prétendument de combattre le chômage des moins qualifiés, il ne l'a pas réduit mais a surtout créé une « trappe à bas salaires ».
Il dissuade les employeurs de proposer des salaires au-dessus de la zone soumise à allègements, ce qui nourrit le phénomène dit de « smicardisation » des salaires. Bien sûr, la loi interdit qu'aucun salarié ne soit rémunéré en dessous du Smic. Une indemnité compensatrice est donc versée aux salariés concernés par les échelons inférieurs au Smic.
Quand ils et elles gagnent un ou deux échelons, l'indemnité diminue et leur rémunération globale n'évolue pas. Ainsi, des années peuvent passer sans aucune amélioration salariale réelle, d’où une amertume compréhensible à ne jamais voir reconnus ni les efforts ni les compétences acquises, notamment par l'ancienneté.
Et c'est ainsi que la pauvreté ne cesse de grandir, y compris parmi les personnes en emploi.
Il est urgent de réviser cette politique !
Alors, s'il n'y a sans doute pas grand-chose à attendre de la « conférence » elle-même, sa préparation, le débat public et médiatique qui va l'entourer peuvent être l'occasion de booster les luttes sur les salaires et de faire entendre les propositions syndicales.
C'est une opportunité à ne pas manquer !