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Cellule PCF ''Plantive'' de Saint-Saulve

Odette Nilès, « la petite fiancée de Guy Môquet », s’évade du camp de Mérignac (L'Humanité)

6 Août 2014, 16:00pm

Publié par Cellule PCF de Saint-Saulve

Odette-Niles.png

 

UN DROIT DE MÉMOIRE ET DE SAVOIR, QUE LA DROITE
ET SON EXTRÊME NE POURRONT JAMAIS REPRENDRE

À LEUR COMPTE !

 

 

L’Humanité du Mercredi 6 août 2014

 

Pour Odette Nilès, la Libération, c’est avant tout sa propre liberté retrouvée. Mais elle a alors toujours en tête le souvenir de ses camarades fusillés à Châteaubriant et de Guy Môquet qui ne peuvent participer à ce moment tant espéré.

En août 1944, Odette Nilès s’est évadée. Celle qui fut, trois ans auparavant, la « petite fiancée de Guy Môquet » s’est échappée, avec  « deux copines », du camp d’internement de Mérignac, en Gironde, où elle était enfermée depuis environ quatre mois. Pour elle, la Libération n’est pas seulement celle du pays.

 

C’est aussi sa propre liberté retrouvée, après des années passées de camp d’internement en camp d’internement, de Châteaubriant (Loire-Atlantique) à Gaillon (Eure), puis Aincourt (Val-d’Oise), Lalande (Yonne) avant Mérignac. « Il y avait eu quelques évasions avant nous. Alors pourquoi ne pas tenter notre chance ? », raconte, espiègle, la vieille dame, aujourd’hui âgée de quatre-vingt-dix ans. « La différence, c’est que les filles qui s’étaient échappées avant nous étaient attendues à l’extérieur. Nous, nous avons dû nous débrouiller par nos propres moyens. » Les trois jeunes filles trompent la vigilance des gardiens, qui « de toute façon étaient euphoriques, parce qu’ils savaient que c’était la fin de la guerre ». Elles se procurent une pince et « s’aident mutuellement à passer les barbelés ».

 

Mais une fois dehors, où aller ? Les deux camarades d’Odette sont tétanisées par la peur. « J’ai alors aperçu une vieille femme qui marchait avec des cannes. Je lui ai demandé : “Madame, savez-vous où nous pouvons aller ? Nous venons de nous évader...” » La dame, coup de chance, les envoie chez un dénommé Duraud, dont le fils est déporté. « Nous sommes arrivées chez des camarades. Ils nous ont hébergées et remises aux mains des FTP, qui occupaient l’hôtel Normandie de Bordeaux. » Mais les dits FTP, « habillés en soldats », ne savent comment employer les trois demoiselles. « Ils nous ont dit : “Vous allez récurer les gamelles!” J’ai prévenu mes copines : il n’en était pas question, ni pour moi, ni pour elles ! »

Embauchée pour s’occuper des forces unies de la jeunesse patriotique.

 

Lorsqu’elle arrive, le 28 août, dans Bordeaux à moitié libérée, ce n’est pas la joie qui envahit Odette, mais un sentiment d’infinie tristesse. « Je voyais tous ces gens défiler en criant “vive De Gaulle”. Et je ne pouvais m’empêcher de penser: “Si seulement ils avaient levé le petit doigt, nous n’en serions pas là.” » Elle a alors toujours en tête « le souvenir de mes camarades fusillés à Châteaubriant » et qui ne peuvent participer à ce moment tant espéré. Surtout, la jeune Odette se dit que tous ces manifestants « ne pensent pas à ces gars grâce à qui la Libération a pu avoir lieu ».

Elle ne le sait pas alors, mais elle rencontre aussi celui qui va devenir son mari, Maurice Nilès, responsable de la région Ouest des FTP jusqu’aux Pyrénées-Orientales. Bordeaux, c’est donc un moment qu’elle taxe de « difficile », avant de reprendre la lutte. Car parmi les FTP de Bordeaux se trouve Marcel Mugnier, l’un des dirigeants de l’organisation, chargé de la jeunesse.

 

Il l’embauche pour s’occuper des forces unies de la jeunesse patriotique. De commune en commune, jusqu’à Angoulême (libérée le 31août), elle réunit « des garçons et des filles anti-allemands, mais qui ne s’étaient pas forcément manifestés ». Mais Odette finit par « en avoir assez ». Elle a envie « de remonter sur Paris, de revoir ma mère, que je n’avais pas vue depuis plusieurs années ». Odette est alors à côté de Royan, en plein siège (du 12septembre 1944 au 17avril 1945). Marcel Mugnier propose de la raccompagner en voiture, avec deux autres compagnons.

Mais le voyage fut épique: « C’était difficile : les Français, pour désorienter les Allemands, avaient retiré ou inversé les pancartes sur les routes. Nous nous sommes perdus ! L’un des gars était un sanguin. Il descendait avec son revolver, faisait ouvrir les portes pour demander notre chemin! » De retour à Drancy, la jeune militante reprend immédiatement contact avec le PCF et la jeunesse communiste.

 

À quatre-vingt-dix ans, la dame vit toujours au même endroit et est encore militante. À la fin de la guerre, Odette a tout juste vingt ans.

Elle avait été arrêtée, avec dix-sept compagnons, en 1941, au métro Richelieu-Drouot, à Paris, après avoir organisé des manifestations contre l’Occupation. Après un interrogatoire musclé, ils sont tous emmenés « au siège du ministère de la Guerre, rue Saint-Dominique », où un tribunal, composé uniquement d’Allemands, s’est réuni.

 

« Ils ont demandé la peine de mort pour tous. Ça fait drôle. Je regardais le magnifique jardin, par la fenêtre. Et je me suis dit : “Dire qu’il fait si beau et qu’il va falloir mourir...” » Au final, les nazis changent la donne: trois gars sont fusillés, neuf sont déportés et les autres envoyés de camp politique en camp politique, en commençant par Châteaubriant. C’est dans ce camp que la jeune Odette rencontre Guy Môquet, dix-sept ans comme elle.

Elle lui avait promis, sans trop savoir ce que c’était, « un patin ». Las. Le matin du 22 octobre 1941, il est fusillé. Avant de mourir, il laisse à sa petite fiancée ce petit mot écrit à la hâte : « Ma petite Odette, je vais mourir avec mes vingt-six camarades. Ce que je regrette, c’est de ne pas avoir eu ce que tu m’as promis. Mille caresses de ton camarade qui t’aime. Guy... »

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